Drôle de drame

Vendredi 15 janvier 2016 au Lycée Autogéré de Paris, 393 rue de Vaugirard, M° Convention ou Porte de Versailles.

Projection de Drôle de drame suivi d’un court montage in progress de scènes d’interrogatoires : N’avoue jamais, jamais, jamais… ou La fiction cinématographique fournit-elle de bons alibis ?


S’il faut donner quelques raisons de projeter ce film, ce n’est pas tant pour justifier la programmation du jour, mais plutôt pour proposer quelques perspectives et pistes de réflexions, à rediscuter ou pas après la projection, et ainsi dérouler quelques unes des raisons de venir même si : le 15ème c’est loin, il fait froid, on l’a peut-être déjà vu et on s’en souvient vaguement, « bizarre, vous avez dit bizarre » on connaît, c’est un vieux film en noir et blanc et on l’a regardé il y a longtemps à la télé en famille. Bref, autant de mauvaises raisons de ne pas se déplacer.

D’abord, par ces projections dans le cadre du ciné-club, il ne s’agit pas tant de voir les films que de les voir ensemble, d’en penser quelque chose, et de proposer à l’adoption les regards subversifs qu’on peut leur porter.

Et puis, dans le mille-feuille formidable de ce film, on trouvera entre autres, pêle-mêle mais bien agencés : une critique de la morale religieuse, des logiques et pratiques policières, du sens commun de la saloperie toujours prêt à lyncher le premier coupable qu’on lui fabrique, des attaques acides contre la tartufferie qui consiste à se considérer l’auteur de quelque chose, un tueur de tueur bien serviable, des mimosas, un journaliste qui travaille en dormant, dialectisant ainsi une des contradictions du mouvement ouvrier, entre stakhanovisme et droit à la paresse, et le tout, justement en noir et blanc, alors que c’est bien la couleur qui est aujourd’hui banale et dont le tapageur imitatif est lassant.

Dans une époque plus que maussade, étouffés entre la défense du drapeau et celle du religieux, alors que certains pensent qu’on y gagne à prendre parti imaginairement pour l’une de ces deux bannières au lieu d’ouvrir des perspectives révolutionnaires, le 15 janvier, venez donc plutôt voir Drôle de drame, un film tellement d’avant garde qu’il est sans doute encore en avance sur aujourd’hui et invite à déserter l’époque autant qu’il le faudra. Et puis c’est pas si souvent qu’un drame est drôle et qu’on peut en rire franchement, et en bonne compagnie.